Au public
« On pourvoit à l'éclairage des villes, on allume tous les soirs, et on fait très bien, des réverbères dans les carrefours, dans les places publiques ; quand donc comprendra-t-on que la nuit peut se faire aussi dans le monde moral, et qu'il faut allumer des flambeaux pour les esprits ? »
Comme ils résonnaient intensément et familièrement à nos oreilles les mots de Victor Hugo que nous avions choisis pour nos Tribunes de la saison dernière ! La culture a été la grande absente de cette campagne électorale. Signe des temps ? Signal d’alerte !
Malgré l’étau du budget qui chaque jour se resserre davantage sur la création, je continue avec l’équipe de la Comédie, avec le Collectif artistique, à défendre une idée forte de la décentralisation. Représenter la Comédie « de Valence, de Drôme et d’Ardèche » au Festival d’Aix-en-Provence avec Les Noces de Figaro, à Paris au Théâtre de la Ville avec … du printemps ! ou à La Colline – théâtre national avec Les Criminels, accompagner douze autres productions du Collectif artistique ainsi que les créations de trois jeunes collectifs comme la Vie Brève, Le Pôle Nord (Ardèche), Caroline Guiela Nguyen (Drôme), créer à Valence un opéra comme L’Empereur d’Atlantis – à chaque fois, une même idée et un même projet font corps : favoriser la circulation des œuvres, des artistes et des publics pour multiplier leurs rencontres. La décentralisation, c’est l’indispensable décloisonnement des espaces et des esprits.
Quel esprit soufflera sur cette saison ? Que ce soit à travers le thème de la justice ou lors des Tribunes, le temps de 2011-2012 a largement été celui des paroles en actes. À ce temps-là, une réponse en forme de contrepoint viendra de Heiner Müller : « Ce dont on ne peut plus parler, il faut le chanter » ! Car un fil court le long des spectacles qui s’annoncent : les « paroles en musique », celles qui puisent leur force dans les univers sonores, celles qui dialoguent avec les rythmes, celles qui s’expriment dans le cri ou dans le chant. Des voix et des notes, des mots et des corps, du son et du sens, de la musique en somme, afin que pour les spectateurs de la Comédie, cette saison soit un temps « enchanté ».